21.7.14

Un ciel grand comme l'Oural


Après un intermède rageur, pour remettre certaines choses à leur place, retournons à la beauté, notre souci principal et incorruptible. Kira Sapguir nous a recommandé ce nouveau venu dans nos murs virtuels : Boris Ryjii, poète de l'Oural mort à 27 ans, suicide par pendaison à Ekaterinenbourg, d'une inspiration lermontovienne, connu aux Pays-Bas où on lui a consacré un documentaire télévisé, et traduit dans plusieurs langues européennes.
Родная, мы будем жить здесь, где нет прохожих,
где лишь созвездья. И пить сплошные сухие вина.
Здесь реки сбросят сухие русла, как змеи — кожу,
за даль метнувшись. И будет пахнуть сырой овчиной.
Закат, что в небо вкровавлен Богом, безумной розой
завянет. Ветры утихнут. Слезы пойдут на убыль.
Мы будем жить здесь. Мы будем вместе смотреть…
А звезды
здесь разноцветны, как в фотоснимке зрачки салюта.
По сути дела не будет лета, зимы и прочих.
Не будет милых моих. Любимых моих. Хороших.
Туман укроет нас белоснежной своей рогожей,
и будут ночи. Сплошные ночи. Сплошные ночи.
Но все проходит. И мы с тобою пройдем задаром.
И будет небо. Сплошное небо, как черный зонт… А
мы будем в ночи, как в отложении — два омара.
…И безресничный прищур безглазого горизонта.
Борис Рыжии (1974-2001)
(Traduit par TM)
Très chère, ici nous vivrons où personne ne passe.
Seule, la constellation. Des vins secs sans autre saveur nous boirons.
Comme les serpents jettent leur peau, ici les rivières de leurs lits desséchés se débarrassent,
Pour s’élancer au loin. Ici règne l’odeur crue de la peau de mouton.
Le couchant, aux cieux ensanglantés par Dieu, se flétrira en rose folle.
Les vents s’apaiseront. Les larmes se tariront.
Ici nous vivrons. Ensemble nous contemplerons…


Mais les étoiles en corolles
Ici sont bariolées comme sur une photo, les prunelles d’un feu d’artifice.
Au fond, il n’y aura plus d’été, plus d’hiver, plus de saisons.
Plus d’êtres chers. Plus les miens. Si bons.
D’une blancheur de neige la brume nous tapisse,
Et les nuits s’appesantiront. Des nuits noires sans la moindre clarté. Des nuits noires où rien ne luit.
Mais tout passe. Et tous deux nous traverserons tout ça sans dommage.
Et le ciel sur nos têtes. Un ciel sans faille, comme un noir parapluie…
Nous serons dans ces nuits comme deux homards fossilisés sans âge.
Sans paupières et sans yeux, l’horizon froncera le sourcil.
Boris Ryjii (1974-2001)